Lettres & Langues et Cultures de l’Antiquité
Slogan du site

Site Lettres et Langues anciennes de l’académie de Lyon.

Créer un corpus augmenté
Article mis en ligne le 28 juin 2018
dernière modification le 19 juin 2018

par Thibaud Hayette

 Objectifs pédagogiques et compétences visés :

Constituer un corpus est une activité fréquente pour le professeur de Lettres. Et si parfois nous y incluons quelques fantaisies ou lectures plus personnelles, le groupement de textes reste généralement canonique car le désir de transmission aux élèves d’un patrimoine littéraire nous y assigne. Ainsi, les mêmes œuvres sont étudiées et dans celles-ci, les mêmes passages, d’un professeur à l’autre, parfois même d’une année sur l’autre. C’est ce qu’ont montré les statistiques présentées lors du 8ème Rendez-vous des Lettres.

Constituer un corpus pour un professeur de Lettres relève certes d’une réflexion personnelle mais la culture acquise nous facilite la tâche et nous puisons naturellement dans les incontournables de la littérature. En manque d’inspiration, nous pouvons nous appuyer sur les manuels, demander aux collègues, etc.

Mais que se passerait-il si l’on demandait aux élèves, par définition en pleine construction culturelle et littéraire, de faire de même ? Retrouverions-nous les mêmes textes ? Serait-ce une tâche complexe voire impossible au collège ?

Les objectifs majeurs étaient de faire prendre conscience à des 4ème la notion de patrimoine littéraire, de les faire réfléchir en commun à ce qu’est un texte littéraire et de leur faire construire des ponts entre les textes.

 Descriptif sommaire :

A partir d’un corpus constitué par le professeur, les élèves, en groupes, ont été amenés à l’enrichir, l’augmenter par l’hypertexte par des notices biographiques, des recherches lexicales, des échos artistiques ou encore par leurs propres productions. Ultime étape pour eux : trouver un texte littéraire s’intégrant dans le corpus.

 Descriptif détaillé :

Les élèves travaillent classiquement sur un corpus imposé par le professeur autour de la thématique de "La nuit". Les textes, de différentes périodes littéraires, sont ainsi analysés en classe (Les Mystères d’Udolphe d’Ann Radcliffe ; Qui sait ? de Maupassant ; Glacé de Bernard Minier). Le corpus est volontairement limité à trois extraits de textes. En parallèle, différentes œuvres sont proposées en lecture cursive (Quelques minutes après minuit, de Patrick Ness ; Le signe de la lune, de Bonet et Munuera ; Les ailes noires de la nuit, de Jean-Marc Ligny ; Docteur Jekyll, Mr Hyde de Stevenson ; Le Horla, de Maupassant) et des analyses d’images viennent en complément, notamment la série de L’empire des Lumières de René Magritte ou un extrait de Ils de Xavier Palud.

Les textes sont déposés par le professeur dans l’espace Groupe du réseau pédagogique, au format LibreOffice. Les élèves sont ensuite amenés, par petits groupes, à "augmenter" le corpus initial grâce à l’hyperlien, directement dans le logiciel de traitement de textes.
Ces augmentations concernent des notices biographiques sur les auteurs, des nuages de mots ou cartes heuristiques pour traiter par exemple le vocabulaire de la nuit présent dans les textes, une affiche publicitaire pour promouvoir le livre choisi en lecture cursive...

Un exemple de texte "augmenté" par l’hyperlien

La création d’un nuage de mots

Pour s’aider et développer leur lexique, ils pouvaient utiliser le dictionnaire électronique :

Une recherche lexicale via le CNRTL

La présentation de leur recherche était libre comme nous le montre ici l’utilisation d’une carte heuristique :

Une carte mentale réalisée avec XMind

Les élèves doivent aussi retrouver sur Gallica BNF le texte original lorsqu’il est référencé :

Retrouver l’extrait sur Gallica

Les élèves enregistrent leur lecture du texte grâce à Audacity en ajoutant un fond sonore approprié en utilisant des bruitages libres de droits sur Universal Soundbank.

Enregistrement audio du texte lu

Chaque groupe voit son dossier de travail s’étoffer en fonction des fichiers qu’ils y ajoutent, qu’ils soient personnels ou externes.

La dernière partie du travail consiste :

- en des productions longues tantôt individuelles, tantôt collaboratives produites « à la manière des auteurs »

- en une recherche d’un texte d’auteur et d’une œuvre picturale qui pourraient compléter le corpus initial.

Ce nouveau corpus, doublement augmenté, sera soumis à un autre groupe pour validation puis sera proposé enfin à une autre classe.

Un exemple de texte choisi par un groupe d’élèves pour compléter le corpus

 Limites et perspectives :

Le travail a vraiment plu aux élèves qui devaient travailler collaborativement tout en étant autonomes dans leurs tâches qu’ils se répartissaient harmonieusement. J’ai eu la chance d’avoir souvent à disposition deux salles informatiques mitoyennes ce qui facilitait les recherches et les productions. J’ai ainsi pu mener la partie numérique en dix heures environ.

Deux activités ont posé problème en revanche :
- la création d’une publicité pour promouvoir le livre découvert en lecture cursive car malgré leur attirance pour ce média, je me suis rendu compte qu’ils en maniaient mal les ressorts et les codes.
- la recherche d’un texte pouvant compléter le corpus car tout d’abord la notion même de "texte littéraire" leur est souvent étrangère et ils puisaient souvent, à l’instar du professeur, dans ce qu’ils connaissent (comme dans la série des Chair de poule par exemple) ; d’autre part, les techniques de recherche étaient souvent maladroites comme cet exemple éloquent - mais ô combien compréhensible - de saisie dans un moteur de recherche : « texte littéraire sur la nuit qui fait peur ». Pourtant, certains ont trouvé des textes pertinents, notamment en utilisant Gallica, Glose (qui offre les incipit de romans contemporains), Wikisource ou même en demandant conseil au professeur documentaliste.

Enfin, d’un point de vue technique, certains groupes ont voulu "faire le ménage" dans leur dossier mutualisé en enlevant trop tôt des fichiers qu’ils jugeaient inutiles, notamment ceux créés par Audacity. Cela les a obligés à recommencer leur enregistrement qu’ils n’avaient pas finalisé. Par ailleurs, d’autres ont voulu organiser a posteriori leurs fichiers en les regroupant dans des sous-dossiers ; ainsi, ils rendaient leurs hyperliens "morts" et ont dû les recréer dans LibreOffice.