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Mise en scène de la lecture d’une tragédie
Article mis en ligne le 1er juin 2015
dernière modification le 25 juin 2015

par Claire Augé

Ce projet est présenté à titre de simple expérimentation. La tragédie classique est au programme de 2nde et si l’on sait évidement combien elle est superbe, on sait aussi combien elle est difficile d’accès pour nos élèves qui la voient plutôt comme un exercice scolaire pénible. Il s’agissait de proposer aux élèves une lecture dynamique, si ce n’est pas un pléonasme. Il ne s’agissait pas de jouer la pièce mais de la « mettre en jeu » pour qu’il y ait lecture active et appropriation de l’œuvre.

Présentation du projet

Classe : 2nde

  • Date de l’expérience : Avril 2015
  • Œuvre intégrale : Britannicus de Racine, XVIIème siècle.
  • Objet d’étude : La tragédie classique.
  • Mise en place du projet : 6 heures de travail.
  • Les heures utilisées sont celles de l’accompagnement pour lequel j’ai ma classe de Seconde en entier.

Compétences pédagogiques travaillées  :

  • Travail en groupe.
  • Connaissance d’une œuvre.
  • Analyse de texte.
  • Écriture d’invention.

Organisation matérielle :
Nouvelle géographie de la classe + papier.
Logiciels : Powerpoint, Powtoon, Edpuzzle

Pour voir le résultat, c’est ici.

Objectif de la séquence :

L’objectif, cette année avec ma classe de 2nde, était de comprendre les caractéristiques du personnage tragique : il est responsable, mais pas coupable ; il commet des erreurs, fait des mauvais choix mais il est poussé par un principe plus fort, le fatum tragique. Il s’agit donc d’amener les élèves à comprendre en quoi chaque scène de la pièce souligne une erreur commise par un personnage, une échappatoire manquée au tragique.

Exemple  : La tragédie s’ouvre sur Agrippine qui attend impatiemment son fils devant sa chambre pour le voir. Cependant, leur rencontre n’aura lieu qu’à la scène 2 de l’acte IV. Alors qu’elle attend cet entretien depuis un moment, sa première action consiste à s’asseoir. Ce geste ne peut qu’irriter et braquer Néron puisqu’il symbolise le pouvoir d’Agrippine qui se replace symboliquement sur le trône face à son fils. Par ce geste, en apparence simple, Agrippine commet une erreur et nous entraîne un peu plus vers l’issue tragique de la pièce.

Descriptif détaillé.

ÉTAPE 1 : Aborder la pièce sous l’angle du jeu de rôle.

Les élèves sont appelés par Racine lui-même à devenir son assistant. Ils doivent, par la lecture, aider Racine à écrire une belle tragédie romaine. L’enjeu est simple : Racine en 1669, en s’inspirant de l’histoire romaine, se confronte au grand Corneille. Il faut donc l’aider à prouver qu’il est non seulement fait pour le théâtre mais que sa tragédie est parfaite, au sens classique du terme.

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ÉTAPE 2 : Devenir spécialiste de l’œuvre racinienne : l’analyse du texte.

La tâche est compliquée puisque le livre interactif mettant en scène un lecteur –assistant de Racine n’existe pas. Il s’agissait donc de le créer.

  • Afin de lancer le travail et de l’expliquer, l’exemple de la scène d’exposition a été soumis aux élèves avec une multitude de situations proposées.
    DOC 1 : Copie d’écran. Exemple de situation proposée.
    Jean Racine : « Je cherche un hémistiche pour montrer la réaction d’Albine… Que choisis-tu ?

DOC 2 : Copie d’écran. Exemple de situation proposée.
Jean Racine : « Tu m’as l’air un peu perdu…On va voir si tu suis bien ! Quelle est la réponse la plus logique d’Agrippine ?

  • Les élèves sont regroupés en binômes. Chaque groupe est responsable de deux scènes de la tragédie. Pour chaque scène, le binôme doit repérer les éléments majeurs et fondamentaux de la scène et préparer trois questions que le dramaturge Racine peut demander à un potentiel assistant.

DOC 3 : Travail d’élèves Acte II, scène 4

DOC 4 :Travail d’élèves Acte II, scène 6

Ce travail a lieu en classe. La géographie de la salle est repensée : les élèves sont regroupés en îlots et le professeur navigue de groupe en groupe pendant la séance. Ils aident les élèves à déchiffrer des parties de la scène. Les élèves utilisent leur livre et les habituels crayons-papiers. Ils ont également l’autorisation d’utiliser leurs smartphones pour consulter un dictionnaire ou l’ordinateur de la salle de classe.

DOC 5 : Une nouvelle géographie pour un travail en binôme optimal

L’aide apportée par le professeur est davantage personnalisée et les questions trouvées par les élèves soulignent différents « degrés de pénétration du texte » (Perrault). Ainsi, un groupe d’élèves ayant plus de facilité s’est interrogé dans la scène 3 de l’acte III sur le crime de lèse-majesté : « Pourquoi Junie coupe-t-elle la parole à Néron au vers 637 ? INDICE : va voir ce lien »

  • Pour terminer le travail, après trois séances d’analyse des deux scènes, les élèves sont en salle informatique afin de mettre en page le texte à l’aide des logiciels powerpoint ou powtoon et d’écrire proprement le corrigé sur le logiciel Word.

ÉTAPE 3 : Finalisation du livre interactif avec Edpuzzle
Au cours de la séquence, le logiciel « Edpuzzle » a été utilisé. Il s’agit d’un logiciel gratuit qui permet non seulement de « morpher » (c’est-à-dire de retoucher) une vidéo en ajoutant un commentaire, des questions, mais aussi de créer un compte classe et de consulter et corriger en ligne les travaux des élèves.

DOC 6 : Copie d’écrans du compte classe sur Edpuzzle.
Réponses d’élèves à une question sur l’acte III, scène 9 : Comment Néron voit-il sa mère dans sa première Tirade ? Justifie ta réponse en quelques mots.

Bilan, limites et perspectives

Ce travail est très chronophage pour le professeur et demande un très grand investissement. Néanmoins, cela permet de placer les élèves en situation de lecteur : on a retrouvé, semble-t-il, une dimension ludique propre à la lecture. Les perspectives semblent alors nombreuses…
En fin de travail, les élèves de la classe ont présenté la tragédie à une autre classe qui avait étudié Andromaque. Leurs présentations, préparées uniquement en classe, ont montré une bonne compréhension de l’œuvre et une lecture plus fine. C’est un point positif évident.
Cependant, des pistes de travail demeurent : on peut constater que si les élèves ont analysé et interprété les vers dans leur corrigé, ils n’ont pas répondu avec la même rigueur et avec la même méthode aux questions de leurs condisciples. On retrouve une certaine paraphrase ou un usage d’une citation-illustration, ce qui est peu satisfaisant. Comment amener les élèves à porter le même regard du lecteur-spécialiste sur un passage qu’il n’a pas étudié ?

Evaluation

L’évaluation est particulièrement difficile pour le professeur dans ce projet. Plusieurs notes ont été attribuées pour projet aux binômes :

  • Une note sur les analyses de texte (création des questions et rédaction du corrigé). La mise en page du texte, si elle est signifiante, apporte un bonus.
  • Une note pour la lecture des scènes travaillées par leurs camarades.

Voici d’autres copies d’écran :