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Écrire un blason avec l’aide d’un dictionnaire en ligne
Article mis en ligne le 16 juin 2009

par Michel Balmont

L’exercice concerne une classe de seconde avec laquelle j’ai étudié le blason dans le cadre de l’objet « Éloge et blâme ». En fin de séquence ils devaient rédiger eux-mêmes un blason et, bien que je le leur aie déconseillé, la plupart ont choisi de le faire en vers, avec des réussites diverses. J’ai demandé aux élèves qui avaient le moins bien réussi de participer à trois séances d’aide individualisée.

Je leur ai demandé de choisir une partie du corps et de rédiger un blason à sa louange. Celle qu’ils souhaitaient, qu’ils aient ou non rédigé leur devoir à son propos ou non. Puisqu’ils avaient choisi de rédiger en vers, j’ai ajouté la contrainte des alexandrins, en précisant qu’ils allaient devoir faire de vrais alexandrins, coupés 6/6 (ou (4/4/4), et non se contenter de douze syllabes. En revanche je leur avais donné toute latitude d’écrire un poème non rimé
- afin de ne pas rajouter une contrainte supplémentaire
- parce justement les élèves qui écrivent de la poésie tendent à faire le contraire, c’est à dire faire rimer des vers qui n’ont aucun rythme interne, comme si la poésie se résumait à la rime

Mais, avant de commencer à rédiger, je leur ai demandé de se rendre sur le CNRTL et de cherche la définition correspondant à la partie du corps qu’ils avaient choisie, afin d’y chercher « l’inspiration ». Ensuite je leur ai donné la méthode pour isoler les parties de la définition qui les intéressait en les surlignant (« via le lien Options d’affichage »). Ils n’avaient pas de consigne particulière quant à ce qu’ils devaient surligner, mais je leur ai signalé que ce qui serait le plus intéressant serait certainement ce que le CNRTL nomme « syntagmes », soit les expressions idiomatiques construites autour du mot en question. Ils devaient ensuite relever ce qui leur paraissait intéressant pour l’écriture du balson.

Voici par exemple ce que cela donne pour « nuque » (le mot est choisi parce que les autres étaient « nez », « œil », trop longs). L’élève a néanmoins fait une recherche complémentaire sur« cheveu »

Tout n’est pas passionnant, mais l’élève a noté sur son brouillon ceci :
- Nuque raide, courbée, tassée, blanche, rasée
- coup sur la nuque ;
- se gratter la nuque ;
- tué d’une balle à la/dans la nuque.
- la nuque frêle et pâle d’où les cheveux s’élevaient en torsades en sombre acajou.
- De la nuque aux talons ; des talons à la nuque ; des pieds à la nuque.
- Des frémissements parcourent son corps, des pieds à la nuque

La seconde recherche consistait à aller chercher les synonymes dans l’onglet qui porte ce nom. Ceci poursuivait un double but :
- augmenter le vocabulaire
- permettre une rédaction plus facile des alexandrins en variant le nombre des syllabes pour désigner la même réalité.

Comme on le constate, peu de chose pour « nuque ». Néanmoins on verra dans la rédaction du poème que l’élève s’est plus inspiré des synonymes que des expressions ou des citations :

Quand d’une seule main tu torsades tes boucles
En un lâche chignon, qu’à mes yeux vagabonds
Tu dévoiles ton cou, je sens monter en moi
Une onde de chaleur, qui fait battre mon cœur.
Quand tu m’as révélé ta nuque délicate,
Je reste fasciné comme pris par l’ivresse,
Ton cou est devant moi, comme un fruit interdit,
Que jamais je n’atteins, il est de ces mirages
Dans le pesant désert de ma vie monotone.
Ta nuque dévoilée ainsi m’a bouleversé.

Les alexandrins se sont révélés difficiles à maîtriser pour les élèves, ce qui n’est pas une surprise. D’où la faible longueur de certains textes, réduits à un quatrain.

Cheveux longs et brillants, aux couleurs du soleil,
Semblables à de la soie cerclée de feuilles d’or,
Ils ont la puissance qu’avaient ceux de Samson
Quand ils font s’écrouler des pans de mon esprit.

On y retrouve bien en revanche l’influence les traces de la recherche dans la définition du CNRTL :

Ce n’est qu’une petite expérience, mais les résultats furent intéressants. Si je devais procéder de nouveau à un travail de ce genre, je choisirai l’octosyllabe au lieu de l’alexandrin, trop difficile à maîtriser, ce qui bride le plaisir des élèves et les empêche d’utiliser pleinement le dictionnaire.